Des médecins réanimateurs* de l’Hôpital Henri-Mondor de l’AP-HP à Créteil ont rapporté, dans une publication scientifique parue dans le New England Journal of Medicine le 10 mars 2016, que le virus Zika, déjà fortement suspect d’être à l'origine de microcéphalies fœtales, et de syndromes de Guillain-Barré, semble aussi pouvoir provoquer une grave infection du cerveau chez l'adulte.
Les médecins décrivent dans cet article la prise en charge début janvier 2016 d’un patient de 81 ans en parfaite santé, adressé pour un accident vasculaire dans le service de neurologie de l’hôpital Henri Mondor, AP-HP.
Devant le caractère inhabituel des troubles, une encéphalite a été évoquée. Devant l’aggravation rapide des symptômes associant un coma, des troubles cognitifs et une atteinte motrice des membres accompagnés d’une fièvre, le patient a été transféré en réanimation médicale et mis sous respiration artificielle. Ce patient était rentré 10 jours auparavant d’une croisière dans le Pacifique Sud (Nouvelle Calédonie, Vanuatu, îles Salomon, Nouvelle Zélande).
Les examens cliniques, biologiques et radiologiques ont conclu à une méningoencéphalite, c’est-à-dire une inflammation importante du cerveau et de son enveloppe, les méninges, généralement causée par une infection.
Les principaux virus et bactéries susceptibles de provoquer une telle infection ont cependant été écartés, de même que certains arbovirus comme la dengue et le chikungunya qui circulent actuellement dans le Pacifique Sud d’où revenait le patient.
Un test d’amplification génique (RT-PCR) a été réalisé au centre de référence des arboviroses de Marseille sur un prélèvement de liquide céphalorachidien (liquide dans lequel baigne le cerveau) du patient. Il a mis en évidence la présence de matériel génétique du virus Zika.
Du virus vivant a par ailleurs pu être isolé à partir de ce même prélèvement sur une culture de cellules. Les médecins ont ainsi raisonnablement conclu à une méningoencéphalite liée au virus Zika. Il s’agit à leur connaissance du premier cas de ce type décrit.
L'état du patient s’est progressivement amélioré, il a pu sortir de réanimation 17 jours après son admission. Un mois après, il avait entièrement recouvré ses fonctions intellectuelles et ne conservait qu’une légère faiblesse du bras gauche.
Un tel diagnostic a été rendu possible par une collaboration multidisciplinaire efficace sur le site de l’hôpital Henri Mondor (réanimation médicale, neurologie et neuroradiologie) ainsi qu’à l’échelle régionale et avec le centre de référence des arboviroses.
Cette observation est importante car elle suggère la nécessité de rechercher le virus Zika chez des patients qui présenteraient une méningoencéphalite dans les zones de circulation du virus. Elle apporte par ailleurs un argument supplémentaire sur la propension du virus Zika à entrainer des lésions du système nerveux.
Références :
*Guillaume Carteaux, M.D., Ph.D.Assistance Publique–Hôpitaux de Paris, Créteil, France
Marianne Maquart, Ph.D.French Armed Forces Biomedical Research Institute, Marseille, France
Alexandre Bedet, M.D.Damien Contou, M.D.Pierre Brugières, M.D.Slim Fourati, M.D., Ph.D. Laurent Cleret de Langavant, M.D., Ph.D.Assistance Publique–Hôpitaux de Paris, Créteil, France
Thomas de Broucker, M.D. Centre Hospitalier de Saint-Denis, Saint-Denis, France
Christian Brun-Buisson, M.D. Assistance Publique–Hôpitaux de Paris, Créteil, France
Isabelle Leparc-Goffart, Ph.D. French Armed Forces Biomedical Research Institute, Marseille, France
Armand Mekontso Dessap, M.D., Ph.D. Université Paris Est Créteil, Créteil, France