Des équipes du service de gynécologie obstétrique de l’hôpital Robert-Debré AP-HP, de l’Inserm et d’Université Paris Cité, avec le groupe d’étude Betadose et le GROG[1] ont mené des travaux pour démontrer la non-infériorité d’une réduction de 50% du traitement par corticothérapie anténatale maternelle (bétaméthasone).
Cette étude, coordonnée par le Pr Thomas Schmitz et le Pr Olivier Baud, a fait l’objet le 20 août 2022 d’une publication au sein de la revue The Lancet.
La corticothérapie administrée à la mère avant l’accouchement est dans le monde entier le traitement anténatal de référence pour prévenir les complications néonatales liées à la prématurité, notamment le syndrome de détresse respiratoire. Ce traitement permet aussi de réduire les complications neurologiques et digestives, et finalement la mortalité en rapport avec un accouchement prématuré.
Cependant, toutes les femmes recevant ce traitement n’accouchent finalement pas prématurément et des effets secondaires sur la croissance et le développement neurologique à long terme, dépendant de la dose délivrée à la mère avant l’accouchement, sont de plus en plus rapportés. La dose de bétaméthasone actuellement recommandée, inchangée depuis 1972, consiste en 2 injections de 12 mg administrées à 24 heures d’intervalle.
Cet essai multicentrique contrôlé randomisé en double aveugle a testé l'hypothèse selon laquelle le traitement avec une demi-dose de bétaméthasone anténatale est non inférieur au traitement avec la dose complète. Il était promu par l’AP-HP et financé par un PHRC national.
C’est la première fois que cette hypothèse a été testée, de plus à une très grande échelle, avec plus de 3 200 femmes incluses dans 37 maternités de niveau 3 en France. Les participantes à l’étude étaient des femmes de 18 ans ou plus avec un seul fœtus et un risque d’accouchement prématuré. Elles avaient toutes reçu la 1ère injection de bétaméthasone avant 32 semaines d’aménorrhée. Elles ont ensuite été tirées au sort pour recevoir soit un placebo, soit la seconde injection 24 heures plus tard.
Le critère principal de jugement était le besoin d'administration intratrachéale de surfactant dans les 48 heures suivant la naissance du nouveau-né pour traiter le syndrome de détresse respiratoire compliquant la naissance prématurée.
Le pourcentage de nouveau-nés ayant besoin de recevoir du surfactant dans la trachée pour traiter le syndrome de détresse respiratoire était de 20.0% dans le groupe ayant reçu la demi-dose et de 17.5% dans le groupe ayant reçu la pleine dose. Cette différence entre les deux groupes ne permet ni de conclure à la non-infériorité de la demi-dose ni à son infériorité pour ce qui concerne le critère de jugement principal. Cependant, les taux des complications les plus graves de la prématurité, comme la dysplasie broncho-pulmonaire, les complications neurologiques ou digestives, ou surtout le décès néonatal, étaient identiques dans les deux groupes.
Par conséquent, bien que ces résultats ne permettent pas dès à présent un passage à la demi-dose de bétaméthasone pour prévenir les complications de la prématurité, ils sont très encourageants et laissent espérer un développement neurologique des enfants identiques dans les deux groupes. Il faudra donc attendre les résultats du suivi neurologique à 5 ans des enfants inclus dans cet essai (Etude BETANINO en cours) pour savoir si un changement de pratique est possible.
Références : Thomas Schmitz, Muriel Doret-Dion, Loic Sentilhes, Olivier Parant, Olivier Claris, Laurent Renesme, Julie Abbal, Aude Girault, Héloïse Torchin, Marie Houllier, Nolwenn Le Saché, Alexandre J Vivanti, Daniele De Luca, Norbert Winer, Cyril Flamant, Claire Thuillier, Pascal Boileau, Julie Blanc, Véronique Brevaut, Pierre-Emmanuel Bouet, Géraldine Gascoin, Gaël Beucher, Valérie Datin-Dorriere, Stéphane Bounan, Pascal Bolot, Christophe Poncelet, Corinne Alberti, Moreno Ursino, Camille Aupiais, Olivier Baud for the BETADOSE trial study group and Groupe de Recherche en Obstétrique et Gynécologie, The Lancet.
DOI : doi.org/10.1016/S0140-6736(22)01535-5
[1] Groupe de recherche en obstétrique et gynécologie