Les équipes du service de réanimation néonatale de l’hôpital Antoine-Béclère AP-HP, de l’Université Paris-Saclay et de l’Inserm, coordonnées par le Pr Daniele De Luca, ont développé un protocole pour la prise en charge des enfants atteints de bronchiolite sévère en cas de pénurie de ressources en réanimation.
Les résultats de cette étude qui adopte une approche multidisciplinaire, clinique et santé publique, ont fait l’objet d’une publication parue le 1er février 2024 dans la revue Lancet EClinicalMedicine.
La bronchiolite est l’infection respiratoire la plus fréquente dans la petite enfance. Elle peut entraîner une mortalité élevée en l’absence de soins respiratoires critiques. Les unités de soins intensifs jouent donc un rôle central dans la prise en charge de la bronchiolite qui est associée à une charge de soins lourde et coûteuse, qui pèsent sur les systèmes de santé.
Après la période Covid, les épidémies saisonnières de virus respiratoire syncytial (VRS), le principal agent étiologique de la bronchiolite, ont été particulièrement sévères et ont pesé sur les systèmes de santé de plusieurs pays à revenu élevé.
En fonction du degré de préparation des équipes, les contaminations croisées nosocomiales pendant les épidémies peuvent également compliquer la situation des unités de soins intensifs pédiatriques, néonatales ou mixtes.
Un seul guide de bonne pratique clinique est dédié à la prise en charge des patients atteints de bronchiolite en unités de soins intensifs. Mais compte tenu du peu d’études spécifiques sur ce sujet, ce guide comporte de nombreux points d’incertitudes et ne prend pas en compte les enjeux de santé publique (par exemple le manque de lits en réanimation, les coûts associés et le risque d’épidémies nosocomiales).
L’objectif de cette analyse de la littérature disponible a été d’examiner le sujet du double point de vue clinique et de santé publique. Elle propose un protocole pour optimiser les soins respiratoires, minimiser les séjours en soins intensifs et le risque d'épidémies nosocomiales, et ainsi « protéger » les lits de soins intensifs pour les rendre disponibles à d’autres patients également gravement malades. Les auteurs fournissent aussi dans cet article des conseils pour préparer les unités de soins intensifs à travailler dans des conditions stressantes liées aux épidémies et réduire le risque de contamination croisée nosocomiale.
En période de crise épidémique, la prise en charge de ces patients peut ainsi se faire en toute sécurité, dans les services de réanimation néonatale, sur la base d’un protocole qui prévoit :
- des chambres à pression négative ;
- l’utilisation de filtres dits à haute efficacité (HEPA, High Efficiency Particulate Air) sur les respirateurs ;
- un isolement strict avec un professionnel infirmier dédié à l’enfant.
Les techniques de ventilation non-invasive, y compris la ventilation neurale NAVA[1] (Neurally adjusted ventilatory assist), ont permis une meilleure efficacité clinique et un non-recours à l’intubation.
Le service de réanimation néonatale de l’hôpital Antoine-Béclère AP-HP applique ce protocole qui pourrait faire évoluer plus largement les pratiques.
Références : Daniele De Luca, Lucilla Pezza, Laura Vivalda, Matteo Di Nardo, Margaux Lepainteur, Eugenio Baraldi, Marco Piastra, Walter Ricciardi, Giorgio Conti, Maria Rosaria Gualano – Lancet ECLinicalMedicine
[1] La ventilation NAVA utilise l’activité du diaphragme pour déclencher le ventilateur, délivrer l’assistance respiratoire de manière proportionnelle à la demande