Les métastases hépatiques liées à un cancer colorectal avec mutation du gène BRAF sont rares. Cette étude multicentrique française, que le Pr Stéphane Benoist, chirurgien dans le service de Chirurgie Digestive et Oncologique à l’hôpital Bicêtre, AP-HP, et président du groupe FRENCH, a coordonné, a évalué l’intérêt de la chirurgie chez 66 patients qui présentaient des métastases hépatiques isolées d’un cancer colorectal avec une mutation BRAF. Il s’agit à ce jour de la plus grosse série mondiale rapportée dans ce contexte.
Le risque de récidive après chirurgie chez ces patients apparaît comparable à celui rapporté dans une population témoin qui ne présentait pas de mutation de BRAF. Chez les patients ayant des métastases hépatiques d’un cancer colorectal avec une mutation de BRAF, ces données suggèrent que la chirurgie reste à ce jour le meilleur traitement pour réduire le risque de progression de la maladie.
Les mutations du gène BRAF sont associées à un mauvais pronostic chez les patients atteints d'un cancer colorectal métastatique, en particulier lorsqu’il s’agit de métastases hépatiques isolées non enlevable chirurgicalement et traitées par chimiothérapie. Dans ce contexte, une étude multicentrique (24 centres), française, rétrospective, cas-témoin, a été mise en place par plusieurs groupes coopérateurs (ACHBT, FRENCH, AGEO), dans le groupe très spécifique des patients atteints d’un cancer colorectal avec mutation de BRAF et porteurs de métastases hépatiques isolées et résécables*. L’objectif de cet essai était d’évaluer l’intérêt de réaliser une résection chirurgicale des métastases hépatiques dans cette population.
Cette étude a inclus 66 patients dont les données ont été comparées à celles de 183 patients appariés**, qui présentaient aussi un cancer colorectal métastatique mais sans mutation du gène BRAF, et qui ont bénéficié d’une résection de leurs métastases hépatiques.
Après un suivi moyen de plus de deux ans (28,7 mois) après la chirurgie, les résultats mettent en évidence un risque de progression comparable dans les deux populations dans la population de référence (cancer colorectal sans mutation de BRAF) et dans la population porteuse d’une mutation de BRAF avec :
> Des taux de survie sans récidive à 1 an de 55,4 et 46,1% respectivement
> Des taux de survie sans récidive à 3 ans, critère principal del’étude, de 27,8 et 19,3% respectivement.
En revanche, au moment de la rechute, les patients avec une mutation du gène BRAF présentent un pronostic moins bon et une maladie plus agressive (que les patients sans mutation du gène BRAF) avec :
> Une médiane de survie globale après la survenue de la récidive de 23 mois (versus 44 mois dans la population de référence),
> Une progression multisite dans 48% des cas (versus 30% dans la population de référence)
> Et un moindre accès possible à la chirurgie à visée curative (27% versus 42% dans la population de référence).
Ces données confirment l’intérêt de proposer une résection des métastases hépatiques aux patients atteints d’un cancer colorectal avec mutation du gène BRAF. En revanche, elles soulignent l’agressivité des récidives tumorales post chirurgicales et suggèrent l’intérêt de développer dans ces contextes des traitements adjuvants complémentaires après la chirurgie.
*Métastases hépatiques résécables : métastases hépatiques qu’il est possible de retirer chirurgicalement
**Patients appariés : patients présentant précisément les mêmes caractéristiques pronostiques
Références:
Poster Session à l’ASCO le dimanche 3 juin 2018 à 8h00, heure locale (15h, heure de Paris) intitulée « What is the prognostic impact of BRAF mutation in patients undergoing resection of colorectal liver metastases ? Results of nationwide intergroup (ACHBT, FRENCH, AGEO) cohort of 249 patients ».
Abstract 3554