
Coordonnée à l’hôpital Bichat AP-HP et à la Harvard Medical School, une étude internationale a permis d’identifier les patients coronariens stables qui pourraient bénéficier d’une faible dose d’anticoagulants en plus de l’aspirine. Ce traitement, plus efficace dans la prévention d’événements cardiovasculaires au long cours, est toutefois susceptible d’entraîner des saignements. Ces travaux, menés par le Dr Arthur Darmon au sein du département de cardiologie de l’hôpital Bichat AP-HP, du réseau de recherche clinique « FACT – French alliance for cardiovascular trials », de l’unité UMR 1148 Inserm « Laboratoire de recherche vasculaire translationnelle », du Département hospitalo-universitaire « Fibrosis, Inflammation and REmodeling » (FIRE), de l’Université de Paris et de l’Imperial College, ont fait l’objet le 02 juillet 2019 d’une publication dans la revue Journal of the American college of cardiology.
La maladie coronaire est la première cause de décès au monde et la seconde en France. Elle est liée à des rétrécissements sur les artères coronaires qui irriguent le muscle cardiaque (ou myocarde), qui peuvent se compliquer de thrombose, entraînant alors un infarctus du myocarde.
Chez les patients coronariens stables, en dehors de la période post-infarctus ou des mois suivant l’implantation d’un stent coronaire, le traitement préventif des événements cardiaques, tels qu'un infarctus, un accident vasculaire cérébral ou un décès cardiovasculaire, repose habituellement sur l'administration d’aspirine à faible dose. Des données récentes* suggèrent que chez certains patients, l’ajout d’une faible dose d’anticoagulants pourrait s’avérer plus efficace. Toutefois leur administration s’accompagne d’une augmentation notable du risque de saignement.
Une équipe, coordonnée par le Pr Gabriel Steg à l’hôpital Bichat AP-HP et le Dr Deepak Bhatt (Harvard Medical School, Boston, MA, USA), a analysé les données de près de 17 000 patients coronariens stables, regroupées au sein du registre international REACH (pour « REduction of Atherothrombosis for Continued Health ») dédié à l’étude des patients à risque d’événements athérothrombotiques. Elle avait pour objectif d’identifier les caractéristiques des patients susceptibles d’avoir le bénéfice/risque le plus favorable à l’administration combinée d’aspirine et d’anticoagulants.
L’équipe a ainsi observé que les patients qui cumulaient plusieurs facteurs de risque (tels que l’âge, l’insuffisance rénale chronique, le diabète, le tabagisme, l’artérite des membres inférieurs, l’insuffisance cardiaque et les plaques carotides…) avaient un risque plus important d’être victime d’un événement cardiovasculaire. En revanche, l’équipe n’a pas observé d’augmentation notable du risque de saignement. Le bénéfice clinique "net" (prévention des évènements cardiovasculaires moins risque de saignement) augmentait directement en fonction du nombre de critères présents, de 6,5% pour les patients ayant un seul critère, à 10,7%, 14,6% et 19,1% pour les patients ayant respectivement deux, trois et quatre critères ou plus.
Ces résultats suggèrent que les patients cumulant deux facteurs de risque de l'étude ou plus sont les plus à même de tirer un bénéfice net d’un renforcement du traitement préventif qui combinerait une administration d’aspirine et d’anticoagulants. Ils contribuent ainsi à mieux optimiser le traitement antithrombotique chez les patients coronariens stables.
*Rivaroxaban with or without Aspirin in Stable Cardiovascular Disease
October 5, 2017 / N Engl J Med 2017; 377:1319-1330; DOI: 10.1056/NEJMoa1709118
Source :
Darmon A, Sorbets E, Ducrocq G, Elbez Y, Abtan J, Popovic B, Ohman EM, Röther J, Wilson PF, Montalescot G, Zeymer U, Bhatt DL, Steg PG.
Journal of the American College of Cardiology 2019;73:3281-91.