Les équipes des services de Médecine intensive-réanimation et de Bactériologie-virologie de l’hôpital Henri-Mondor AP-HP, de l’Inserm et d’Université Paris-Est-Créteil, coordonnées par le Pr Nicolas de Prost et le Pr Slim Fourati, ont étudié les caractéristiques cliniques et virologiques associées à la gravité de l’infection Omicron chez les patients hospitalisés en réanimation ou en soins intensifs, par rapport à l’infection Delta.
Les résultats de l’étude SEVARVIR, financée par l’ANRS | Maladies infectieuses émergentes grâce au soutien du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche dans le cadre du consortium EMERGEN1 et promue par l’AP-HP ont été publiés le 12 octobre 2022 dans la revue Nature Communications.
La Covid-19 est une maladie infectieuse due au coronavirus SARS-CoV-2, apparue en 2019 et responsable d’une pandémie de grande ampleur. Après la découverte de la maladie chez l’homme, la France a mis en place une surveillance active de l’émergence et de la circulation des variants du virus, accompagnée de programmes de recherche, au sein d’EMERGEN, coordonné par l’ANRS | Maladies infectieuses émergentes et Santé publique France. Ainsi, de nouveaux variants ont pu être détectés, dont Delta et Omicron, et des études lancées pour répondre aux questions scientifiques qui s’y rapportaient.
L’infection par le variant Omicron du SARS-CoV-2 et ses sous-linéages est considérée comme moins grave que l’infection par les variants pré-existants, en particulier le variant Delta.
L’objectif de cette étude était de définir les caractéristiques des différents phénotypes des patients infectés selon les variants Omicron et Delta ayant présenté des cas sévères.
L’équipe de recherche a analysé les caractéristiques cliniques et virologiques selon les données de 20 services de réanimation en France, pour 377 patients admis entre décembre 2021 et mai 2022 pour une infection sévère à SARS-CoV-2.
Après séquençage, 259 patients ont ainsi été inclus dans l’étude,148 infectés par le variant Omicron et 111 par le variant Delta.
Les résultats de cette étude montrent que, parmi les personnes ayant eu une forme sévère de la maladie, le phénotype clinique des patients infectés par Omicron diffère de celui des patients infectés par Delta.
La part de patient immunodéprimés infectés par le variant Omicron était trois fois supérieure à celle des patients infectés par le variant Delta : 43% des patients infectés par Omicron étaient immunodéprimés contre 13% des patients infectés par Delta.
Parmi les patients infectés par Omicron, 85,9% avaient reçu deux doses de vaccin ou plus mais affichaient une mauvaise réponse humorale à la vaccination.
Parmi les patients infectés par Omicron, le taux de mortalité des patients immunodéprimés était significativement plus élevé (47%) que celui des patients immunocompétents2.
Par rapport aux patients infectés par le variant Delta, ceux infectés par le variant Omicron étaient plus âgés et présentaient des comorbidités significativement plus fréquentes, notamment une hypertension, une insuffisance respiratoire chronique et une insuffisance rénale chronique, ainsi qu’un score sur l’échelle de fragilité clinique plus élevé.
En conclusion, le phénotype clinique des malades atteints de COVID-19 hospitalisés en réanimation ou en soins intensifs était différent en fonction du variant : les patients infectés par le variant Omicron étaient davantage vaccinés mais majoritairement plus immunodéprimés que ceux infectés par le variant Delta. La mortalité à 28 jours n’était pas différente entre les deux groupes.
[1] Cette étude a été sélectionnée par un comité d’experts internationaux fin 2021 pour bénéficier d’un financement dédié aux projets à fort potentiel d’impact par l’ANRS |Maladies infectieuses émergentes dans le cadre du soutien du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche au consortium Emergen : https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/fr/la-recherche-au-coeur-du-plan-de-surveillance-genomique-du-territoire-francais-de-variants-du-sars-83065
[2] capacité du corps à produire une réponse immunitaire normale, après exposition à un antigène/pathogène
Référence : Nicolas de Prost, Etienne Audureau, Nicholas Heming, Elyanne Gault, Tài Pham, Amal Chaghouri, Nina de Montmollin, Guillaume Voiriot, Laurence Morand-Joubert, Adrien Joseph, Marie-Laure Chaix, Sébastien Préau, Raphaël Favory, Aurélie Guigon, Charles-Edouard Luyt, Sonia Burrel, Julien Mayaux, Stéphane Marot, Damien Roux, Diane Descamps, Sylvie Meireles, Frédéric Pène, Flore Rozenberg, Damien Contou, Amandine Henry, Stéphane Gaudry, Ségolène Brichler, Jean-François Timsit, Antoine Kimmoun, Cédric Hartard, Louise-Marie Jandeaux, Samira Fafi-Kremer, Paul Gabarre, Malo Emery, Claudio Garcia-Sanchez, Sébastien Jochmans, Aurélia Pitsch, Djillali Annane, Elie Azoulay, Armand Mekontso Dessap, Christophe Rodriguez, Jean-Michel Pawlotsky, Slim Fourati. Nature Communications
DOI : https://doi.org/10.1038/s41467-022-33801-z