Le Conseil de surveillance (CS) de l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris, réuni le 26 mars 2021 sous la présidence d’Anne Hidalgo, Maire de Paris, alerte sur la dégradation de la situation sanitaire, la pression extrêmement forte sur l’hôpital et les conditions difficiles du débat public quant aux mesures de freinage de l’épidémie de Covid-19. Il se prononce pour la poursuite du dialogue avec les associations de patients et représentants des usagers du système de santé afin d’améliorer encore l’accompagnement des patients et de leurs proches face à la maladie et au deuil dans ce contexte. Le Conseil se félicite de l’ouverture des travaux d’actualisation du projet médical du futur hôpital du Grand Paris Nord, avec l’objectif d’inclure ses activités dans un projet territorial de santé adapté à son bassin de population. Sur proposition de la Présidence, la présentation et la discussion des rapports de la Cour Régionale des Comptes sont reportées à l’ordre du jour de la prochaine séance du Conseil de surveillance prévue le 16 avril 2021.
Le Conseil de surveillance a salué une nouvelle fois l’engagement de tous les professionnels de l’AP-HP et des professionnels de santé du territoire confrontés à une troisième vague très violente de l’épidémie de Covid-19. Anne Hidalgo a réitéré, au nom du CS et des citoyennes et citoyens du territoire du CHU, son soutien indéfectible aux professionnels et aux patients, à l’heure où des choix difficiles vont encore devoir être faits.
► Evolution de l’épidémie de la Covid-19 et gestion de la crise sanitaire
Le CS remercie tous les acteurs de santé d’Île-de-France pour leur détermination à limiter la détérioration des conditions de prise en charge de tous les patients malgré la dégradation de la situation épidémique et la pression croissante sur l’hôpital.
Le Conseil de surveillance ne peut que constater l’augmentation très rapide de l’incidence du Covid-19 en Île-de-France, l’aggravation de tous les indicateurs prédictifs de l’épidémie dans la région et l’extrême tension qui pèse d’ores et déjà sur les services de soins critiques et intensifs de l’AP-HP.
Au 25 mars 2021, le nombre de patients atteints du Covid-19 dans les services de réanimation de la région est supérieur à ce qu’il était au pic de la deuxième vague. Le nombre quotidien d’admissions à l’AP-HP, en réanimation comme en hospitalisation conventionnelle, n’a pas été aussi élevé depuis mars 2020. Dans ce contexte, l’ARS d’Île-de-France demande de porter à plus de 1500 le nombre de lits de soins critiques disponibles à l’AP-HP. Cette nécessité impliquerait jusqu’à 80% de déprogrammation des autres activités afin de redéployer les personnels et les étudiants en santé sur les services dédiés aux patients atteints de Covid-19.
Le CS entend la forte inquiétude de la communauté de l’AP-HP quant à des modes de prise en charge qui s’apparenteraient à ceux d’une médecine de catastrophe, ainsi que le regret de se retrouver dans une situation où il n’est d’autres choix que de déprogrammer des soins. C’est une situation qui pose question, tant au plan éthique que déontologique, pour tous les soignants et au-delà pour la société.
Le CS tient aussi à mettre en exergue la remarquable mobilisation de toutes les autorités et des acteurs de santé de l’Île-de-France, et notamment de l’ensemble de ses hôpitaux pour dépister, soigner et vacciner sans relâche.
Anne Hidalgo a salué « la force et la justesse des propos tenus quant à la persistance des faiblesses structurelles de la gestion de l’hôpital public au cours de cette crise et aux incompréhensions suscitées par les épisodes de pénurie sur les masques, sur les tests et aujourd’hui sur les doses de vaccins dont il faudra tirer tous les enseignements ».
Elle a poursuivi en indiquant que « La crise sanitaire a révélé au grand public le manque de moyens auquel l’hôpital public est confronté mais aussi sa capacité à réaliser l’extraordinaire. Tout ce qui a été partagé sur ces sujets, notamment au CS de l’AP-HP, participe à l’élaboration d’un consensus national sur l’idée qu’il faut mieux traiter l’hôpital afin qu’il puisse mieux nous soigner ».
« Cette crise sanitaire met par ailleurs sous tension, au plan politique, les conditions d’un débat public serein sur les solutions pouvant être apportées, tant il est difficile d’introduire aujourd’hui de la nuance entre des positions parfois très antagonistes, ou immédiatement hystérisées sur les réseaux sociaux. Dans ces conditions, seules une information transparente et partagée sur l’évolution de l’épidémie d’une part, et l’accélération de la campagne vaccinale d’autre part, permettront de lutter efficacement contre la progression du virus et de ses variants », a-t-elle conclu.
► Droits des patients et de leur famille en période d’épidémie de Covid-19
Le CS incite à réinterroger les procédures nationales mise en place au printemps 2020 pour les décès faisant suite à une infection au Sars-CoV-2.
La crise sanitaire a mis et continue de mettre en tension deux défis : l’obligation de protection des patients hospitalisés et du personnel contre le virus d’un côté, et le nécessaire accompagnement des patients par leurs proches de l’autre. Il a été difficile en mars 2020 de satisfaire aux demandes de visites pour des patients hospitalisés ou hébergés dans des unités de soins de longue durée (USLD). Les représentants des usagers au CS ont mis en lumière l’importante mobilisation dès avril 2020 des équipes pour associer les usagers à l’élaboration des consignes, distribuer des tablettes aux patients pour garder le lien et promouvoir la médiation auprès des familles sur les conditions de visite
Aujourd’hui, les personnes hospitalisées peuvent recevoir un visiteur par jour. Le principe d’interdiction des visites pour les personnes symptomatiques ou atteintes de COVID-19 demeure, sauf dans des circonstances exceptionnelles comme les situations de fin de vie ou de difficultés psychologiques. Pour les personnes hébergées dans les unités de soins de longue durée qui ne sont pas vaccinées, les visites sont limitées à deux personnes par jour en une seule visite.
En l’absence d’un droit consacré pour les proches comme celui existant pour les patients, la difficulté de trouver un point équilibre entre les droits de ces derniers et les demandes des proches a été soulevée. Le CS rappelle la nécessité d’une concertation constante et approfondie, tenant compte à la fois des souhaits du patient, de son état et des contraintes de fonctionnement du service.
Face à la troisième vague et après plus d’un an de pression sur l’hôpital, il y a un besoin accru de médiation comme voie d’apaisement. Plusieurs membres du CS ont suggéré d’impliquer encore davantage les associations de bénévoles des sites hospitaliers, dont beaucoup ont été vaccinés à l’initiative de l’AP-HP. Le CS s’interroge, enfin, sur la pertinence sanitaire des recommandations nationales édictées lors la première vague en matière de soins funéraires pour les personnes décédées du COVID-19.
La Présidente a conclu sur l’importance de retours d’expériences avec les associations et représentants d’usagers à l’échelle de chaque site hospitalier pour pouvoir avancer sur ces questions très importantes et « briser les tabous ».
►Point d’étape sur le Campus hospitalo-universitaire de Saint-Ouen Grand Paris Nord
Le CS soutient l’élaboration d’un projet territorial de santé à partir du l’actualisation du projet médical de l’hôpital du Grand Paris Nord.
Le 4 mars 2021, le groupement Renzo Piano Building Workshop a été déclaré, à l’unanimité du jury, lauréat du concours d’architecture pour concevoir le futur Hôpital de Saint-Ouen - Grand Paris Nord.
Le campus réunira, à l’horizon 2028, les activités hospitalières de médecine, chirurgie et obstétrique des hôpitaux Beaujon et Bichat-Claude Bernard, ainsi que les activités d’enseignement et de recherche en santé d’Université de Paris (médecine, odontologie et soins infirmiers).
Les étapes marquantes de ce projet élaboré depuis presque 10 ans par le CHU ont été rappelées.
Il est né de la volonté de rééquilibrer l’offre de soins vers le nord de la métropole parisienne et de répondre à la vétusté des hôpitaux Bichat et Beaujon. Depuis 2009, parmi les nombreuses études menées par différents cabinets d’architecture sur 24 sites possibles de localisation, toutes les hypothèses de rénovation des deux sites existants ont été non concluantes. Le choix a été fait en 2016 d’un site à Saint-Ouen-sur-Seine équidistant des deux hôpitaux actuels, et d’un projet complémentaire sur la parcelle de Claude Bernard (Paris 18e). Le projet prévoit alors 1071 lits et places et une évolution forte vers l’ambulatoire, avec une baisse du nombre de lits d’hospitalisation conventionnelle, mais une augmentation de 33% des places d’hôpital de jour et de 16% des lits de réanimation et soins critiques, ainsi que 150 lits d’hôtel Hospitalier. En 2018, le site de l’ancienne usine du groupe PSA, au centre de Saint-Ouen-sur-Seine, est retenu, puis, en 2019, le campus est qualifié de projet d’intérêt général. En octobre 2020, tirant les leçons de la crise, l’APHP a obtenu l’ajout de 90 lits au futur hôpital, le portant ainsi à 1167 lits et places (dont 94 en période de tension) ainsi qu’un financement supplémentaire pour adapter le projet aux situations de crise.
En décembre dernier, l’APHP et l’Université ont invité deux collectifs à présenter au public leurs alternatives. L’un demande la transformation de l’usine PSA en un site patrimonial et culturel, mission qui ne relève pas de l’AP-HP. L’autre propose de construire un petit hôpital et de conserver, en les rénovant sur place, les hôpitaux Bichat et Beaujon. Cette hypothèse est à nouveau écartée sur la base des études déjà effectuées depuis 2010 et de leur actualisation par le bilan de la crise sanitaire.
Désormais, la communauté des hôpitaux Bichat et Beaujon travaille à l’actualisation du projet médical du futur hôpital et à l’inclusion de ses activités dans un projet territorial de santé spécifique au large bassin de population du nord de la métropole parisienne.
La discussion a permis de confirmer les orientations suivantes :
- la nécessité de réaffirmer dans le projet médical une cohérence forte avec la recherche et particulièrement les activités cœur-poumon, infectiologie, pathologies digestives ;
- le renforcement des activités en amont et aval du Grand Hôpital Nord telles l’offre ambulatoire hospitalière et celle des soins de suite et de réadaptation (SSR), lesquelles pourraient avoir vocation à se situer sur les parcelles de Claude Bernard et/ou de Victor Hugo ;
- l’enrichissement de l’offre de soins en partenariat avec les autres Hôpitaux et acteurs de santé de ce vaste territoire ;
- une meilleure adaptation des effectifs paramédicaux à la densité des soins ;
- la nécessaire prise en compte des attentes de l’environnement qui conduisent à réaliser, avec les collectivités du territoire, une étude de mobilité actualisée et élargie aux enjeux d’insertion urbaine.
La Présidente du Conseil de surveillance a souligné, en conclusion des discussions, « le caractère enthousiasmant de la proposition architecturale faite pour le futur Hôpital ».
Elle a précisé « avoir toujours soutenu ce grand projet et continuer de le soutenir sous réserve de l’attention à la question du capacitaire qui sera redéfinie dans le nouveau projet médical du Grand Hôpital Nord et de la qualité du projet territorial qui en découlera ». Elle a proposé à cette fin de mobiliser l’Atelier parisien d’urbanisme (APUR) pour mettre à disposition du CHU les données urbaines et sociétales spécifiques à de ce bassin de vie et contribuer à l’élaboration du futur projet territorial de santé.
►Présentation du rapport de la Chambre Régionale des Comptes du 17 novembre 2020 relatif à la gouvernance et situation financière de l’AP-HP pour les exercices 2015 et suivants.
En raison de l’actualité et de la mobilisation de plusieurs de ses membres à des réunions de crise le même jour, le Conseil de surveillance décide de reporter à sa prochaine séance, prévue le 16 avril 2021, la présentation et la discussion des rapports de la Cour Régionale des Comptes.
►Pour en savoir plus : http://www.ccomptes.fr/Nos-activites/Chambres-regionales-des-comptes-CRC/Ile-de-France
À propos de l’AP-HP :
L’AP-HP est un centre hospitalier universitaire à dimension européenne mondialement reconnu. Elle s’organise en six groupements hospitalo-universitaires (AP-HP. Centre - Université de Paris ; AP-HP. Sorbonne Université ; AP-HP. Nord - Université de Paris ; AP-HP. Université Paris Saclay ; AP-HP. Hôpitaux Universitaires Henri Mondor et AP-HP. Hôpitaux Universitaires Paris Seine-Saint-Denis) et s’articule autour de cinq universités franciliennes. Ses 39 hôpitaux accueillent chaque année 8,3 millions de personnes malades : en consultation, en urgence, lors d’hospitalisations programmées ou en hospitalisation à domicile. Elle assure un service public de santé pour tous, 24h/24, et c’est pour elle à la fois un devoir et une fierté. L’AP-HP est le premier employeur d’Ile de-France : 100 000 personnes – médecins, chercheurs, paramédicaux, personnels administratifs et ouvriers – y travaillent. http://www.aphp.fr