Mis à jour le 10/02/2025
Des avancées pour diagnostiquer et prédire le risque de complications cardiomusculaires sous immunothérapie
L’équipe du centre d'investigation clinique et de cardio-oncologie de l’hôpital Pitié-Salpêtrière AP-HP, de l’Inserm et de Sorbonne Université, coordonnée par le Pr Joe-Elie Salem continue ses recherches sur les myocardites survenues à la suite d’un traitement par inhibiteurs de point de contrôle immunitaire. Les résultats de leurs travaux récents ont fait l’objet d’une publication le 15 juin 2023 dans Circulation et d’une autre le 26 octobre 2023 dans Nature Medicine.
Les inhibiteurs de points de contrôle immunitaire constituent une classe d'agents immuno-thérapeutiques qui influent sur l’état d’activation de certaines cellules immunitaires, les rendant plus efficaces pour tuer les cellules cancéreuses. Dans de rares cas, cela entraîne une hyperactivité du système immunitaire qui va attaquer les cellules musculaires, dont le cœur et les muscles respiratoires. Ces atteintes sont potentiellement fatales, d'où l'importance d'un diagnostic précoce et d'une prise en charge adaptée en centre expert.
Ce type de dommage musculaire est connu sous le nom de cardio-myotoxicité, ou de myocardite lorsqu'il implique le muscle cardiaque, ou de myosites lors qu'il implique les autres muscles. Les patients sous traitement par inhibiteur de point de contrôle immunitaire (ICI) sont à risque de développer des myocardites, et cela survient chez moins de 1% des patients traités par inhibiteurs de point de contrôle immunitaire.
Certains biomarqueurs cardiomusculaires sont efficaces pour le diagnostic et le pronostic des myocardites suite à un traitement par inhibiteurs de point de contrôle immunitaire
L’équipe de recherche a étudié la présence de biomarqueurs cardiomusculaires dans le diagnostic et le pronostic des myocardites survenues à la suite à un traitement par ICI. Les résultats de cette étude ont fait l’objet d’une publication le 15 juin 2023 dans Circulation. L’équipe a étudié l’augmentation des biomarqueurs cardio-musculaires, en particulier la troponine-T (cTnT), la troponine-I (cTnI), et la créatine kinase (CK) chez 60 patients souffrant de myocardites ICI, et cela durant 1 an dans deux unités de cardio-oncologie (hôpitaux Pitié-Salpêtrière AP-HP et universitaire d’Heidelberg en Allemagne). Au total, 1 751 échantillons cTnT, 920 échantillons cTnI et 1 191 échantillons de créatine kinase (CK) ont été prélevés de manière sériée dans le temps durant cette année de suivi.
L’objectif de l’étude était de prédire la survenue d’événements cardiomyotoxiques indésirables majeurs (MACE) comme une insuffisance cardiaque, une arythmie ventriculaire, un bloc majeur de la conduction auriculo-ventriculaire ou d'une insuffisance des muscles de la respiratoire requérant un support ventilatoire. 24 patients sur 60 (40 %) ont développé un MACE. Dans les 72 heures suivant l'admission, les taux de cTnT étaient constamment augmentés par rapport aux limites supérieures de référence (URL), en revanche cela était plus inconsistant pour la cTnI et les CK. La cTnT était augmenté chez tous les patients au moment du premier MACE, et seulement chez environ les 3/4 pour la cTnI. Au total, la cTnT était plus sensible que la cTnI et les CK pour le diagnostic et la surveillance des patients atteints de myocardite suite à un traitement par inhibiteurs de point de contrôle immunitaire. Un seuil de cTnT > 32 fois la norme supérieure identifie un sous-groupe à très haut risque de MACE.