Les médecins concepteurs de l’algorithme Hy-Result® présentent de nouveaux résultats de leurs recherches menées à l’hôpital européen Georges-Pompidou AP-HP, à la Clinique Universitaire Saint-Luc à Bruxelles et via le site automesure.com.
Ces données font l’objet de trois communications lors des 37èmes Journées de l’Hypertension artérielle organisées à Paris les 14 et 15 décembre 2017.
L’algorithme Hy-Result® d’interprétation automatique des résultats de mesure de pression artérielle est un système original permettant aux patients qui pratiquent l’automesure tensionnelle au domicile (50 à 60 % des patients hypertendus en Europe) de respecter le protocole d’automesure et de mieux comprendre leurs résultats. C’est un système d’aide à la décision conforme aux recommandations scientifiques.
L’algorithme combine les résultats d’automesure du patient, ses données de profil clinique et les recommandations (informatisées) de l’ESH 1.
Le résultat est restitué sous la forme d’un compte rendu PDF comprenant un graphique qui récapitule les mesures, avec calcul des moyennes, et des messages textes rédigés en langage adapté pour le grand public par un comité d’experts internationaux de l’hypertension artérielle (voir automesure.com et hy-result.com).
Sa validité scientifique a fait l’objet d’une étude clinique publiée dans Blood Pressure Monitoring Journal 2. En 2017 (Janvier à Novembre) Hy-Result® a été consulté par 66 300 utilisateurs, a analysé 32 600 séries d’automesure et généré 15 150 compte rendus PDF pour les dossiers patients.
Une étude quantitative patients versus internautes
Ce travail, inclus dans le programme Self-Hy qui bénéficie du soutien de la Fondation de l’avenir, porte sur les avis de 284 utilisateurs répartis en deux groupes :
> 133 patients vus dans deux centres d’excellence ESH d’hypertension artérielle francophones : à l’Hôpital européen Georges Pompidou AP-HPen France, et à la Clinique Universitaire Saint-Luc à Bruxelles, en Belgique ;
> 151 internautes utilisateurs de l’application en langue française depuis le site automesure.com.
Ces deux groupes ont des caractéristiques différentes : le premier est composé de patients hypertendus utilisateurs de Hy-Result® sur recommandation du médecin hospitalier ; le second, d’internautes qui ont découvert l’enquête en dehors d’un contexte médical et dont seuls 20 % environ ont déclaré prendre un traitement anti-hypertenseur.
De plus, les médecins traitants du groupe des internautes recommandaient moins l’automesure que ceux du groupe hospitalier de référence (53 % vs 87 % respectivement; p <0,001). Les réponses analysées sont issues d’un autoquestionnaire en ligne de 24 questions fermées, indépendantes, auxquelles les utilisateurs répondaient de façon anonyme (et en aveugle des médecins recommandant l’applicatif pour ce qui concerne les patients recrutés en milieu hospitalier). Plusieurs dimensions ont été étudiées.
Aide apporté par le système
Les avis sur l’aide apportée par le système sont nettement favorables dans les deux groupes
(98 % dans les deux groupes). Ce résultat positif s’explique par le fait que, dès sa conception, la mise en place de la solution s’est faite avec la participation des patients.
Relations avec les médecins traitants
43 % des hypertendus vus en milieu hospitalier ont communiqué leur compte rendu à leur médecin généraliste (tous ont également communiqué avec le spécialiste selon le protocole appliqué à ce groupe) ; la proportion est comparable (36 %, non différemment significative p = 0,23) dans le groupe internautes.
En outre, 94 % des médecins généralistes à qui ce groupe a transmis le compte rendu Hy-Result® l’ont jugé utile (versus 5 % qui ne l’ont pas regardé et 1 % qui ont déconseillé au patient l’usage de Hy-Result®). Un résultat important puisqu’il est essentiel de concevoir des outils rapprochant les patients de leurs médecins.
Taux de réutilisation
77 % des patients vus à l’hôpital et 52 % des internautes déclarent qu’ils vont continuer à utiliser Hy-Result®. Le moindre pourcentage dans le groupe internaute (différence significative p <0,001) s’explique par la différence de composition des groupes : les internautes sont plus jeunes, moins hypertendus et prennent moins de médicaments anti-hypertenseurs que les patients vus à l’hôpital ; ils ont donc moins besoin d’utiliser Hy-Result® dans leur quotidien.
Confiance dans le système
Seuls 3 % des internautes ont déclaré ne pas avoir confiance dans le système (versus 1 % dans le « groupe hôpital », différence non significative). Un si haut degré de confiance dans le groupe des internautes n’était pas attendu.
« On doit s’interroger sur le constat que le degré de confiance de la part du groupe internautes où l’incitation à utiliser le logiciel ne provenait pas d’un médecin traitant s’avère comparable à celui du groupe de patients suivis à l’hôpital et à qui nous conseillons l’usage du logiciel. Trop d’applications e-santé dans le domaine de l’hypertension sont de qualité médiocre et on peut craindre que les internautes utilisent des systèmes insuffisamment fiables comme cela a été montré aux Etats-Unis 3,4. Il faut préférer une utilisation des nouvelles technologies via le conseil des professionnels de santé et non pas celui des publicités ou des moteurs de recherche car les internautes sont probablement trop crédules », déclare le Dr Nicolas Postel-Vinay, de l’unité d’hypertension artérielle de l’Hôpital européen Georges Pompidou AP-HP.
Etude qualitative par focus groupe en médecine générale
Avec la méthodologie des focus group, le Dr Emmanuelle Pébelier (Rennes) a analysé les opinions des patients hypertendus quant à l’utilisation de la web application Hy-Result®.
Cinq médecins généralistes (zones rurale, semi rurale, urbaine) et un spécialiste de l’HTA (zone urbaine) ont proposé à 24 patients hypertendus d’utiliser Hy-Result® et de venir faire part de leurs opinions lors de quatre réunions. Les patients hypertendus expriment majoritairement une opinion favorable quant à l’utilisation d’Hy-Result®.
L’étude a détaillé plusieurs dimensions. La simplicité et la facilité d’utilisation de l’outil sont soulignées par les patients à l’unanimité. Concernant l’aide à la décision Hy-Result® entraîne des réactions adaptées de la part des patients en, suivant chaque cas, alertant, rassurant, ou permettant de temporiser avant de consulter son médecin.
Hy-Result® n’engendre pas plus d’angoisse chez les patients ; «pour l’angoisse, si elle doit exister, elle existait déjà » indique un patient.
La moitié des patients ont exprimé avoir confiance dans l’utilisation d’Hy-Result®. Tous les patients adhèrent au fait que cette application web ne donne pas de diagnostic mais seulement des préconisations.
Enfin les patients préfèrent que la demande d’utilisation d’Hy-Result® émane du médecin. Ils sont conscients que le médecin n’est pas remplacé par une « machine » et conserve son rôle central dans la prise en charge de l’HTA.
La relation avec le médecin n’a pas été modifiée par l’utilisation de l’application que les patients perçoivent comme complémentaire à la consultation avec le médecin.
Capacité des patients à rendre compte par eux-mêmes de leurs traitements antihypertenseurs
En utilisant l’application Hy-Result® les patients doivent renseigner leur profil (poids, taille, comorbidités, prise d’un traitement antihypertenseur ou non). De façon facultative, ils sont invités à préciser le détail de leurs médicaments antihypertenseurs (nom, dosage, horaires de prise, nombre de traitements).
Le Dr José Noguéria, de l’unité d’hypertension artérielle de l’Hôpital européen Georges Pompidou AP-HP, a analysé la qualité des données renseignées par les patients eux-mêmes par leur comparaison à leur dossier médical.
96 % patients avaient donné le détail de leurs traitements. Sur 84 comptes rendus adressés par mail par les patients aux spécialistes d’hypertension de l’HEGP AP-HP, 73 % des informations se révélées en totale concordance sur l’ensemble des 4 critères, (100 % des patients ont donné le nom exact des médicaments, 98 % le bon horaire, 87 % la bonne dose, 89 % le bon nombre de médicaments).
Sur toutes les discordances retrouvées, la plus fréquente portait sur des erreurs ou oublis de dosage dans les traitements combinés (lorsqu’un comprimé contient deux principes actifs donc deux dosages).
Au total, l’utilisation d’Hy-Result® en pratique médicale courante s’avère à la fois valide et facile sous réserve que les patients disposent d’internet.
« La prochaine étape sera l’évaluation de l’impact du logiciel sur l’optimisation du parcours des patients. Sachant que l’hypertension artérielle concerne un tiers de la population adulte, l’utilisation des nouvelles technologies revêt des enjeux considérables sur l’évolution de nos prises en charge, notamment pour distinguer les patients qui relèvent d’une orientation vers les centres spécialisés et ceux dont le suivi doit se faire en ville. L’impact du logiciel sur l’observance au traitement antihypertenseur sera aussi à évaluer » a commenté le PrMichel Azizi, chef de l’unité d’hypertension artérielle de l’Hôpital Européen Georges Pompidou AP-HP labellisé Centre d’excellence en hypertension artérielle par la Société Européenne d’Hypertension artérielle et la Société française d’hypertension artérielle
(www.centre-hypertension.org).
Note et références :
1 – ESH/ESC Task Force for the Management of Arterial Hypertension.
2013 Practice guidelines for the management of arterial hypertension of the European Society of Hypertension (ESH) and the European Society of Cardiology (ESC): ESH/ESC Task Force for the Management of Arterial Hypertension.
J Hypertens. 2013 Oct; 31(10):1925–38
2 – Postel-Vinay N, Bobrie G, Ruelland A, Oufkir M, Savard S, Persu A, Katsahian S, Plouin PF. Automated interpretation of home blood pressure assessment (Hy-Result software) versus physician’s assessment: a validation study.
Blood Press Monit 2016 Apr;21(2):111-7.
3 – Kumar N et al. A content analysis of smartphone– based applications for hypertension management
J Am Soc Hypertens 2015; 9: 130–136.
4 – Plante T, Urrea B, Macfarlane Z, Blumenthal R, Miller E, Appel L, Martin S. Validation of the Instant Blood Pressure Smartphone App.
JAMA Internal Med 2016: 176: 701-2