Avec sa blouse blanche, Pascale Jean-Cornut pourrait passer pour un médecin de l'hôpital Saint-Louis, où elle officie depuis 23 ans comme... professeur d'espagnol. Membre de l'association "l'école à l'hôpital", elle fait partie des milliers de bénévoles intervenant dans les hôpitaux parisiens, où leur "richesse" est de mieux en mieux reconnue.
En témoigne le tout premier colloque dédié aux associations, au volontariat et à l'engagement organisé jeudi par l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP).
L'occasion de remercier les bénévoles, "indispensables" et "membres à part entière de la communauté hospitalière", selon Martin Hirsch, le directeur général de l'institution francilienne.
Visites, aide matérielle, activités culturelles, mais aussi participation à la recherche pour certaines pathologies ou représentation des usagers dans les instances hospitalières.... Quelque 200 associations interviennent à l'AP-HP, de manières très diverses.
Pour les personnels, la collaboration "ne va pas toujours de soi", mais les bénévoles ont un "apport propre", complémentaire du soin, a rappelé M. Hirsch en ouvrant la journée.
Ils ne sont pas là pour remplacer les professionnels, pour "combler un manque, pour boucher un trou ou pour cacher une misère", a-t-il insisté.
Difficile, de fait, de ne pas reconnaître les bienfaits d'une association comme l'"école à l'hôpital" qui, depuis 1929, aide les jeunes patients à poursuivre leurs études et à se projeter.
Une mission qui "apporte énormément" à Pascale. "C'est une leçon de courage", assure-t-elle, montrant sur son portable le message de remerciements envoyé par un ancien élève.
Allongée dans son lit, Chloé (le prénom a été changé), en première S, se réveille à peine quand arrive son prof de maths. "Ce n'est pas parce qu'on est malade qu'il faut renoncer à ses objectifs", lance la jeune fille pour expliquer sa motivation.
Mises à part l'école à l'hôpital et la VMEH (visite des malades en établissements hospitaliers), plus de 200 ans au compteur, la plupart des associations ont été créées après la seconde guerre mondiale, contribuant à l'"humanisation" des hôpitaux.
Le grand public connaît bien les initiatives à destination des enfants, comme les clowns du Rire médecin, ou des personnes âgées isolées, accompagnées par les Petits frères des pauvres.
- 'Besoin d'évasion' -
Mais l'engagement peut aller plus loin, comme l'illustre bien l'émulation associative au coeur du service d'hématologie adolescents et jeunes adultes (Aja) de Saint-Louis.
Inauguré en 2011, "l'Aja" promeut une prise en charge globale des patients de 15 à 25 ans, tenant compte des problématiques médicales mais aussi psychosociales propres à cette période.
Ateliers pâtisserie, ciné-club, cours de gym, massages, soins esthétiques... Une vingtaine d'associations tentent d'améliorer le bien-être des patients. Un chiffre qui a "explosé" ces dernières années, selon Corinne de Blignières, responsable de l'école à l'hôpital, à Saint-Louis depuis 25 ans.
"C'est un plus pour les patients", assure Céline Gilet, cadre de santé à l'Aja, rappelant que les associations financent également de nombreux projets, comme la création d'une salle des familles ou des chambres plus chaleureuses.
C'est Marion Lazaro, animatrice de 25 ans, qui orchestre depuis 4 ans la collaboration entre les personnels, les associations et les patients.
"Cela a été compliqué au début", confie-t-elle, en référence aux réticences des personnels. Mais "cela va de mieux en mieux", assure la jeune femme, assise dans la salle d'activité aux murs couverts de super-héros.
Elle plaisante avec Nadège, une aide-soignante de 31 ans, qui reconnaît "n'avoir vu que des difficultés" à son arrivée dans le service, craignant d'être dérangée pendant les soins. Désormais, elle comprend le "besoin d'évasion des jeunes" et a "même envie de revenir pendant ses repos pour certaines activités" avec eux.
Le concept a convaincu. Pour preuve, Marion Lazaro a été embauchée par l'AP-HP, alors que son poste était initialement financé pour deux ans par l'institut national du cancer. Il mériterait d'être étendu aux services adultes, juge Nadège.
Depuis un an, des groupes de travail sur la valorisation des associations sont organisés à l'AP-HP, qui envisage notamment de former les bénévoles au fonctionnement de l'hôpital.