Après avoir rapporté les premiers résultats positifs de la dénervation rénale dans l’hypertension artérielle (HTA) résistante dans la revue The Lancet en 2015, l’équipe du Centre d’Excellence en Hypertension Artérielle et du CIC1418 APHP-Inserm conduites par le Pr Michel Azizi et celle du service de radiologie interventionnelle conduite par le Pr Marc Sapoval de l’hôpital Européen Georges Pompidou, AP-HP, ont obtenu de nouveaux résultats prometteurs chez des patients hypertendus ne recevant aucun traitement antihypertenseur dans le cadre d’une étude internationale. Ils apportent, pour la première fois, la preuve de la réduction de la pression artérielle après dénervation rénale par ultrasons focalisés dans cette indication. Les résultats de l’étude RADIANCE-SOLO, coordonnée par l’hôpital européen Georges-Pompidou, AP-HP, ont été présentés au congrès EuroPCR à Paris et lors du congrès de la Société Européenne d’HTA à Barcelone. Ils sont publiés dans la revue The Lancet. Ils ouvrent ainsi de nouvelles perspectives de traitement dans cette pathologie qui touche 30% de la population française en permettant d’envisager dans le futur une alternative au traitement médicamenteux pour certains patients.
La dénervation rénale par voie endovasculaire consiste à interrompre l’activité électrique des nerfs du système nerveux sympathique à destinée rénale en délivrant des ultrasons focalisés par l’intermédiaire d’un cathéter dans l’étude RADIANCE-SOLO ou en utilisant une autre technologie basée sur un courant électrique de faible intensité. Cette nouvelle piste thérapeutique a été développée initialement pour traiter l’HTA sévère et résistante à au moins 3 médicaments hypertenseurs.
Une étude internationale dirigée par le Pr Michel Azizi de l’Hôpital européen Georges-Pompidou, AP-HP - chef de service, Centre d’Excellence en Hypertension Artérielle et Coordonnateur CIC1418 APHP-Inserm - et de l’Université Paris-Descartes, et le Pr Laura Mauri (Université d’Harvard, Brigham and Women's Hospital, Boston, USA) a été menée en collaboration avec une start-up américaine. Elle avait pour but d’évaluer de façon objective l’efficacité tensionnelle et la sécurité de la dénervation rénale par ultrasons contre une intervention fictive - appelée « sham »- pour la première fois chez des patients ne recevant aucun traitement médicamenteux pour leur HTA.
Au total, 146 patients ayant une HTA modérée ne prenant aucun médicament antihypertenseur ont été répartis par tirage sort entre le groupe traité par dénervation rénale ou le groupe « sham » limité à une artériographie diagnostique.
Ni les patients ni l’équipe médicale assurant le suivi des patients ne connaissaient le groupe auquel ils avaient été assignés par le tirage au sort. L’intervention fictive ou « sham » avec maintien de l’insu de la randomisation des patients et des équipes médicales permet de s’affranchir de l’effet placebo en particulier dans l’HTA et a été approuvée par les autorités de santé et le comité de protection des personnes en France et dans le monde.
Après 2 mois de suivi sans addition de traitement antihypertenseur sauf en cas de nécessité de sécurité, les résultats de l’étude montrent que :
- la pression systolique ambulatoire diurne a été réduite de façon significativement plus importante dans le groupe dénervation (-8,5 mmHg) que dans le groupe sham (-2,2 mmHg), soit une différence de 6,3 mmHg en faveur de la dénervation rénale.
- plus de 66% des sujets traités par dénervation rénale ont eu une réduction de 5 mmHg ou plus de la pression artérielle systolique ambulatoire diurne, comparativement à 33% dans le groupe témoin.
- 20% des patients traités par dénervation rénale avaient leur pression artérielle normalisée sans prendre aucun médicament antihypertenseur contre 3% dans le groupe témoin.
- Aucun évènement indésirable grave n'a été observé.
(*mmHg : millimètre de mercure)
La dénervation rénale a donc un effet hypotenseur à moyen terme chez des patients ayant une HTA et ne recevant aucun médicament antihypertenseur.
En France, l’hypertension artérielle touche environ 30% de la population et peut conduire à des complications cardiovasculaires ou rénales graves, parfois mortelles. Malgré la disponibilité de nombreuses classes médicamenteuses différentes, l’HTA reste mal contrôlée chez plus de 45% des patients hypertendus en France[1] et dans le monde.
« Le maintien à long terme de cette réduction tensionnelle après une procédure de dénervation rénale aurait des conséquences bénéfiques en termes de réduction des évènements cardiovasculaires et cérébrovasculaires chez les patients ayant une HTA. Le suivi à 6, 12 et 36 mois est en cours et donnera des indications sur le maintien à distance de la baisse tensionnelle » explique le Pr Michel Azizi, Hôpital Européen Georges Pompidou, AP-HP.
Le programme de recherche RADIANCE-HTN se poursuit actuellement pour inclure des patients ayant une HTA résistante qui est à plus haut risque de complications. Les patients pionniers et la communauté médicale, cherchent ensembles à ouvrir de nouvelles perspectives de simplification et de personnalisation du traitement de l’HTA en France et dans le monde, afin de contribuer à son meilleur contrôle et à en réduire les complications.
[1] étude épidémiologie ESTEBAN menée par Santé Publique France et à l’échelle mondiale l’étude May Measurement Month 2017
Sources
Azizi M, Schmieder RE, Mahfoud F, Weber MA, Daemen J, Davies J, Basile J, Kirtane AJ, Wang Y, Lobo MD, Saxena M, Feyz L, Rader F, Lurz P, Sayer J, Sapoval M, Levy T, Sanghvi K, Abraham J, Sharp ASP, Fisher NDL, Bloch MJ, Reeve-Stoffer H, Coleman L, Mullin C, Mauri L; RADIANCE-HTN Investigators.
Lancet. 2018 May 22. pii: S0140-6736(18)31082-1. doi: 10.1016/S0140-6736(18)31082-1. [Epub ahead of print] PMID: 29803590
Service du Pr Michel Azizi, Hôpital Européen Georges Pompidou, AP-HP
www.centre-hypertension.org